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Jean-Charles Fortin

Nous avons quitté Sydney vers 7AM ce matin. Un beau grand ciel bleu et une colonie de méduses s’étaient donné rendez-vous autour de notre embarcation pour l’occasion. Toujours impressionnant de voir ces repoussantes créatures gluantes marauder à la surface… Rien à voir avec notre ô combien appétissant déjeuner de pain doré assorti de bananes et Nutella…

Fort peu de vent au programme aujourd’hui; c’est à croire qu’Éole a oublié d’entrer au bureau ce matin. Nous avons donc décidé de naviguer à moteur, d’autant plus qu’une distance considérable de  270 miles nautiques ou environ 500 kilomètres nous séparent de notre destination finale, Shediac. Pour ce faire, nous travaillerons en quarts de travail, à savoir, 3 équipes de jeunes et adultes ont été formées afin d’assurer la besogne sur des rotations de 4 heures de travail pour les 36 prochaines heures. Ainsi, selon la toujours imagée nomenclature marine, on retrouve le quart des chiens de midi à 16h et de minuit à 4h, le quart des romantiques de 4h à 8h et de 16h à 20h puis le quart des ours de 8h à midi et de 20h à minuit. Les tâches? Lire la carte puis calculer la course ou l’azimut, tenir la barre, faire la vigie à la proue, relever les données sur l’état des constituantes de la salle des machines, observer les données radar pour éviter les collisions avec d’éventuelles embarcations, etc.

Nous remontons donc la côte est de l’île du Cap Breton afin de contourner son extrémité nord-est puis redescendre vers le sud-ouest. Au large du Cap North, un banc de brouillard limite notre vue…mais pas assez pour nous faire manquer un banc d’une vingtaine de globicéphales, une espèce de petite baleine aussi appelée béluga africain! Quel spectacle fabuleux! On ferme les moteurs et on admire… Nous sommes chanceux, elles sont à environ 100 mètres de nous. On se régale de ce ballet gracieux pour une bonne dizaine de minutes.

Nous poursuivons la route le long de Black Rock et Cap St-Lawrence en direction de Chéticamp. Des formations rocheuses d’une beauté inimaginable s’offrent à nous. Notre capitaine, qui compte près de 40 ans de navigation, affirme d’ailleurs que cette partie de l’île du cap Breton est possiblement la plus belle région côtière qu’il connaisse, c’est bien pour dire! Mais surtout, il s’agit d’une côte qui regorge de vie. À preuve, un deuxième banc de globicéphales croise notre route! Encore plus nombreux, ceux-ci se dirigent droit vers nous! En un rien de temps, ils se retrouvent à 10 mètres de nous! C’est complètement fou! Et au moment où on pense avoir tout vu, une partie du groupe décide de s’approcher davantage et passe sous notre bateau! Je vous dis : j’ai la chance de cumuler au moins 50 sorties de kayak, zodiac et bateau de tout acabit pour faire de l’observation de mammifères marins dans ma vie et je n’ai jamais rien vue de tel!  Débile, capoté, cinglé, incroyable, renversant, étourdissant (prière d’utiliser la ligne qui suit pour ajouter votre synonyme préféré) ______________________ !!

Et je ne vous parle pas des dizaines et dizaines de phoques du Groenland, tous plus curieux les uns que les autres, qui se sortent la face pour nous saluer au passage, ou encore des albatros qui volent en rase-motte autour de nous, des colonies de fous de bassan qui piquent dans l’eau et en ressortent 5-6 secondes plus tard poisson au bec et du beau bonjour d’un macareux, un petit pingouin absolument craquant. J’oubliais presque : on a aussi fait 3 observations de rorquals communs, dont un qui nous a fait le bonheur de nous montrer sa belle grosse queue avant de plonger.
Au moment d’écrire ces lignes, les ours sont aux commandes. Les chiens reprendront du service à minuit et les romantiques – dont je fais partie – se lèveront à 3h30 pour reprendre le boulot. J’ai beau chercher, je ne vois vraiment pas ce qu’il y a de romantique à se lever à une telle heure… Allez, bonne nuit!

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