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Jean-Charles Fortin

Au fil des derniers billets, vous aurez probablement compris que nous avons établi des équipes de travail afin de procéder au nettoyage du bateau et à la préparation des repas. Ce matin, c’était au tour de mon équipe de faire le déjeuner. Béatrice, Ryan, Alex B et moi avons donc préparé avec amour et bananes un succulent repas dont se sont régalés nos comparses. Nous avions toutefois sous-estimé la charge de travail que représente la concoction d’un repas pour 21 personnes… Tous mes respects à ces femmes d’une autre époque qui devaient nourrir leur famille de 15 enfants! Dans la même veine, soulignons que nous avons également établi un système de rotation qui fait en sorte que nous avons droit à une douche à tous les 3 jours, question de respecter la capacité de stockage et de chauffage d’eau du bateau. En vérité, c’est du luxe, sachant que nous n’avions pas d’accès aux douches lors des précédentes expés de kayak de mer, de canot ou de rando avec la Fondation…

Nous quittons donc Baddeck au petit matin pour emprunter le Great Bras d’Or en direction de l’océan. Le ciel est lourd et les vents sont relativement soutenus. Notre progression au sein de ce canal se fait à moteur et nous avons donc le temps de tenir un deuxième atelier de nœuds avant que Béatrice, Ryan et Tomas se portent volontaires pour faire la lessive des linges à vaisselle. Pendant ce temps, le ciel se dégage; devant nous : l’azur.

Notre passage sous le pont de Seal Island marque notre arrivée dans le golfe du St-Laurent et donc dans l’océan Atlantique. Que d’eau à perte de vue! Il est temps de monter les voiles! Les jeunes hissent la grand voile puis la trinquette et nous voguons ainsi pendant une bonne demi-heure avant de nous retrouver au beau milieu d’un territoire de pêche truffé de bouées indiquant l’emplacement des cages aux homards. Une fois sortis de ce bourbier, la force des vents nous permet de hisser une troisième voile, le foc. L’allure devient alors sportive… De plus en plus sportive… La gîte dépasse les 20 degrés! Si certains jubilent et crient de joie, d’autres (jeunes mais aussi adultes…) subissent même le mal de mer… On prend alors la décision d’affaler les voiles avant d’affoler les matelots… La situation n’est pas dangereuse mais elle peut paraître intimidante pour des néophytes… Et fort heureusement qu’on redescend les voiles car au moment même où les plus hardis d’entre nous terminons le boulot, des bourrasques de 35 nœuds ragent en notre direction! L’embrun nous fouette le visage! Le bateau tangue tel un bronco de rodéo! Les vents écornent les bœufs! (Bon, d’accord, il n’y a pas de bovidés à bord, mais vous voyez le genre…). Devant de telles forces de la nature, on se sent à la fois puissants et vulnérables mais surtout, tellement vivants! Une bien belle expérience en définitive…même pour ceux qui ont souffert du mal de mer car ceux-ci ont eu l’occasion de manger une bouchée entre temps, un vieux remède de marin qui, bien qu’en apparence paradoxal, apporte un soulagement rapide.

Les vagues diminuant d’envergure à l’approche de la côte, nous voguerons bien tranquillement par la suite vers la ville de Sydney où nous amarrons au Dobson Yacht Club. Nous y sommes accueillis de manière ponctuelle par les membres du club comme si nous étions des vedettes! On nous prend en photo, on nous pose des tonnes de questions, on nous donne une caisse de boissons gazeuses… Ces Néo-écossais sont d’une gentillesse inouïe! Autre fait inouï, on sent le sol se dérober sous nos jambes, un peu comme si nous étions encore dans le bateau. Assez étrange comme sensation… C’est comme si on avait pris une tasse!

En fin de journée, le souper est agrémenté d’un jeu improvisé par Michel : interdit de parler français sous peine de devoir faire la vaisselle pour tout le monde! Au bout du compte, notre infirmière Naila, Béatrice et Tomas se mettront à la tâche pour nous tous… Merci à vous trois, c’était justement mon tour ce soir! Une fois la corvée de vaisselle terminée, tous se rassemblent pour jouer une partie de « bananes-bananes / oignons-oignons ». À les entendre éclater de rire encore et encore, on ne pourrait jamais s’imaginer qu’ils ont affrontés des vents de 35 nœuds quelques 8 heures plus tôt…

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