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Jean-Charles Fortin

En définitive, la navigation à voile de nuit fut sublime. Les vents faibles nous permettaient d’entendre le souffle des rorquals, véritables geysers marins sporadiques et imprévisibles brisant notre solitude de marin. Un peu plus haut dans la nuit d’encre, la (presque) pleine lune lançait une lumière blafarde sur une mer déridée. Catherine a même réussi à faire croire à Béa, Camille et Justen qu’il était nécessaire de se mettre de la crème lunaire tellement celle-ci rayonnait… Pis encore, l’équipe des romantiques ont pu simultanément voir le coucher de lune à babord et le lever de soleil à tribord. J’imagine que c’est de pareilles situations qu’ils tirent leurs noms…

Les plus perspicaces d’entre vous avez donc compris que nous filions vers le nord…  En effet, les pronostics météo nous annonçaient des vents du sud-ouest relativement faibles en soirée puis gagnant en force au petit matin, ce qui nous permettait de passer la nuit à voile sans danger, mais surtout, ce qui nous permettait de filer tout doucement vers…les Îles-de-la-Madeleine! Quel joyau, quel bijou que cet archipel! Vues de l’eau, ses côtes teintées d’ocre surplombé de collines verdoyantes sont des plus invitantes! Et c’est sans parler des émeraudes, des turquoises, des azurs et autres déclinaison de bleu-vert que nous renvoie la mer environnante et ses multiples hauts-fonds sablonneux. D’autant plus que le ciel est d’un bleu sans fin, complètement dénudé de nuages…

Nous amarrons à l’île du Havre-Aubert en tout début d’après-midi. Nous déambulons par la suite sur la légendaire Grande grave, une bande s’étirant le long de l’île du Havre-Aubert, quelque chose comme le Broadway des Îles… La météo est absolument parfaite : 26C, pas un nuage, brise saline de 15 km/h; on ne saurait demander mieux! On en profite pour s’imprégner des paysages spectaculaires et des habitations colorées qui en font partie ou bien pour aller faire un tour au Musée de la mer ou encore à l’Aquarium des Îles.

En fin d’après-midi, nous nous rendons sur la magnifique plage du Bout-du-banc aussi appelée Sandy Hook. Il s’agit d’une plage au sable si fin que même les Cubains en seraient jaloux. Elle s’étire sur une dizaine de kilomètres et, à notre grand étonnement, il ne s’y trouve pratiquement personne; c’en est presque notre plage privée! On en profite pour se baigner, jouer au football ou au freesbee, enterrer Tomas dans le sable ou tout simplement relaxer et laisser le temps prendre son temps, comme les locaux savent si bien le faire.

Entre-temps, notre madelinot de capitaine Roger fait aller ses contacts : il nous revient avec 50 livres de moules, 25 homards frais pêchés de ce matin, des pommes de terre, des plats de crudités, des baguettes de pain, de même qu’une grosse marmite et un brûleur au propane. Tandis que nous nous délectons de ces trésors de la mer autour d’un grand feu de joie monté sur la plage, une pleine lune rose se lève au large et crève le pourpre de la ceinture de Vénus. En retrait pour capturer cette scène avec mon appareil-photo, je vis un moment de lucidité au cours duquel je réalise toute la chance que nous avons. Un moment de joie pure qui restera longtemps gravé dans nos cœurs; un moment que l’on voudrait éternel.

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