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Gabrielle Desbiens

Je rédige ces lignes en écoutant la playlist Spotify créée collectivement pendant le transport du retour en bus. Ça m’aide à mieux vivre cet étrange état d’atterrissage. Et ça me fait bien rire de me souvenir des contextes dans lesquels ces chansons ont été chantées (et nos voix pas très justes, mais vraiment en harmonie).

On se réveille une dernière fois au son du ukulélé avec la chanson Home du groupe Edward Sharpe and The Magnetic Zeros. Notre nuit dans la salle communautaire s’est avérée douce, au son des petits moteurs ronfleurs. C’est un matin plus facile, car oui, nous sommes au camp de base, mais nous devrons nous organiser rapidement, puisque nous avons beaucoup de route à faire, et ce, dans toutes les directions du Canada.

Les guides nous ont concocté des gaufres avec de la crème fouettée, plein de fruits frais, des granolas, du pain, bref, la panacée, encore. On va s’ennuyer du café cuit sur le feu ou sur le réchaud. Ils nous ont installé·e·s sur une table champêtre et tout le monde mange en discutant. On le sent un peu, ce moment de départ qui s’en vient. Dix jours de vie collective, ça tisse serré.

Notre dernière activité de groupe est animée par Jessica. Elle nous propose de tracer l’itinéraire de notre aventure sur les cartes physiques qui nous ont servi pendant notre expédition. Attablé·e·s, équipé·e·s de crayons feutres, les participant·e·s revivent les différentes étapes du voyage et voient se matérialiser le chemin parcouru. J’ai bien l’impression que cette carte sera encadrée, affichée dans quelques demeures.

Premiers adieux. Partir de Pine Grove sans les guides, sans notre médecin, Lysianne. Lysianne a été une médecin exemplaire. Autant contribuait-elle de manière dynamique aux tâches sur les campements, qu’elle devait gérer l’ensemble des états de santé, puis nos petits bobos quotidiens et s’assurer qu’on n’attrapait pas de coup de soleil (all you can cream). Une femme de rigueur, une grande passionnée d’aventure, qui a voyagé partout et qui s’émerveille, comme nous, de la nature avec ses yeux d’enfant.

Nos au revoir à l’équipe de Désir de découvrir — Jessica, Hippolyte et Anne-Sophie, humain·e·s extraordinaires — sont doux et sentis. Ils et elles ont été d’une générosité absolument incroyable et nous ont transmis des connaissances, mais surtout une approche, une manière de vivre en cohésion avec nous-mêmes et avec la nature. Ce sont des exemples qui nous marqueront pour toujours. (En plus, Jessica nous a promis la liste de tous les repas… héhéhé, super bonus !)

Dans le bus voyageur qui nous ramène, encore des chansons, nos classiques. On profite de ces quelques heures encore pour remplir le journal collectif. On y insère des petits mots pour chacun·e, on fait des listes de tunes, de repas, d’insides, de « all you can… » (demandez-le pas, c’est notre plus gros inside de l’expé).

Catherine et Marie-Michelle ont pris le temps de bien placer les défis du retour à la maison. Cela a été dit précédemment, mais vous le verrez bien : vos personnes qui reviennent de cette expédition auront construit des souvenirs, des histoires, des liens qui sont uniques à cette bulle dans l’espace-temps du moment. Ça marque. Revenir de tout ce vécu se fait à plusieurs niveaux, en plusieurs étapes, à travers une panoplie d’émotions. Les participant·e·s le savent : l’équipe de la Fondation sera encore là pour elles et eux, à l’écoute et en soutien.

On arrive à Montréal, où une bonne partie du groupe se dispersera. Laurentides, Estrie, C.-B., Manitoba, Nouveau-Brunswick, Toronto… Autant d’endroits où chacun et chacune aura son divan pour squatter en visite, n’importe quand. C’est un peu la promesse qu’on se fait. C’est triste, pis pas en même temps. L’histoire de la Fondation démontre la solidité des liens qui s’y tissent en expédition ; je pense que ce pouvoir de connexion est viable dans le temps. Enfin, c’est ce qu’on se dit. Ça atténue la cassure, ça nous rassure en quelque sorte.

Plus tard en soirée, les vidéos de retrouvailles fusent. Les pitous contents, les minous repus, les proches heureux de nous retrouver. Je pense à la belle amoureuse de Vincent qui est venue le chercher directement à son arrivée, à Montréal. Belles retrouvailles.

J’aurais envie de boucler la boucle avec deux éléments. Tout d’abord, avec Catherine qui cite Mario Bilodeau : « … en revenant de cette expédition, il serait inexact de penser que vous perdez ces 12 personnes, amis, amies. Au contraire, vous venez de gagner la richesse de ces 12 relations… ». Oui. Des liens immuables, intemporels, inoubliables.

Deuxio, sur la route du parc des Laurentides, Marie-Michelle m’a partagé ce qu’elle a vu. Elle a vu la version d’eux et elles, enfants. S’émerveiller. Apprendre. L’ouverture à l’autre. La curiosité simple et naïve. Le plaisir. La simplicité. La vie déconnectée. Le mieux-être dans des espaces naturels, ouverts, grands, sains. La capacité de vivre le moment présent. La relation avec le monde animal. L’enthousiasme dans la réalisation de tâches répétitives. L’entraide. Chanter spontanément, tout le temps. Le cœur ouvert, grand, accueillant. J’aime le mot anglais genuine. Quelque chose de vrai dans ce vécu et, surtout, beaucoup de lumière dans ces yeux qui ont brillé au soleil, comme sous la pluie, sous les étoiles, dans l’eau, yeux dans les yeux, les cœurs connectés.

C’est le bagage avec lequel on revient vers vous. Et c’est sur ça que je vous dis merci de nous avoir suivi·e·s ici. Ce fut un réel plaisir de partager avec vous. Bon accueil et bon retour.

Gabrielle