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Catégories

Expéditions

Auteur

Louis-Étienne Prévost

Tout le monde s’est levé bien reposé mais on sent que le niveau d’énergie a baissé à la suite de la grosse journée de mardi. Au programme pour ce mercredi : une journée qui, sur le plan physique, sera définitivement plus facile que celle d’hier mais qui est susceptible de générer des émotions.

Au réveil, encore une fois au son des Ukulélés, du haut de notre falaise, on peut voir les nuages de brumes qui roulent sur la Spanish en contrebas. Il fallait être là, sur place, au bon moment parce que 15 minutes plus tard le soleil avait fait disparaitre la brume.

Ce matin, nous avons gruau et bagel avec confiture de fraise comme combustible pour l’avant-midi.

On refait la chaîne humaine pour redescendre les bagages au niveau de la rivière et on recharge les canots. Il faut faire très attention parce que les roches au bord de la rivière sont très glissantes. Les guides s’occupent de la partie plus problématique car ils ont plus d’expérience.

Dans l’écope d’un des canots, on trouve une grosse araignée d’eau avec son sac à œufs. Tous les participants qui le désirent ont la chance de la voir de près.

Jake et Amy nous donnent le programme de la journée. La Journée sera au plus d’une douzaine de kilomètres, sans portage avec un seul rapide un peu technique et quelques sections d’eau vive. À comparer à notre journée d’hier qui a été très exigeante pour tout le monde, pas seulement les participants, ce sera du gâteau. On nous avertit que ce sera cependant très rocailleux.

Dans notre seul rapide de la journée, il y a effectivement de grands champs de patates, c’est-à-dire des roches de petites ou moyenne taille et quelques-uns vont faire du jardinage nécessitant l’aide des guides pour se déprendre et repartir. Dans la deuxième partie du rapide, on nous avait annoncé un gros train de vagues pyramidales à éviter, mais finalement le volume d’eau étant probablement moins élevé que les guides l’avaient franchi, c’est tout à fait raisonnable. Tout le monde s’en donne à cœur joie parce que c’est notre dernier rapide du voyage.

Pour ce dernier rapide, j’avais Alexandre comme partenaire et à part un petit séjour dans le champ de patates, nous avons fait ça quasiment comme des pros. Bien content d’avoir eu Alexandre comme coéquipier pour cet avant-midi. On a fait plus amples connaissances et on a peaufiné nos techniques de canot.

On s’arrête pour dîner sur une grande plage rocailleuse bordée par une forêt dont les arbres ont partiellement brûlé lors d’un incendie ce printemps. Ceux qui s’y aventurent reviennent avec de la suie.

Après le dîner, une bâche est montée car les cumulus se gonflent et se transforment en gros choux-fleur et on ne veut pas prendre de chance pour la discussion qui va suivre. Finalement on s’installe au bout de la plage, et il semble qu’on va s’en tirer.

Marie-Michelle ouvre la discussion en rappelant que personne n’est obligé de prendre la parole. La prise de parole est sur base volontaire. Elle présente ce moment comme une occasion d’aller au-delà des discussions informelles qui ont déjà eu lieu dans le groupe. Puis, elle demande aux participants qui le souhaitent de partager avec les autres un moment significatif au cours de la période de leur vie où ils ont été confrontés au cancer.

Il faut se rappeler que le groupe est composé d’ado de 14 à 18 ans. La profondeur de leur réflexion est surprenante et touche tous les aspects de la vie, la famille, les amis, et eux-mêmes. Ce sont des témoignages sincères et authentiques qui suscitent de grandes émotions non seulement chez ceux qui ont la générosité de les faire, mais aussi chez les autres participants et les accompagnateurs. Je ressors de ces expéditions toujours troublé par ces témoignages mais aussi épaté de la maturité et la lucidité extraordinaire des participants.

Après un petit moment pour laisser passer la tempête émotive, tout le monde, reprend son VFI et son casque et se réinstalle pour finir les quelques kilomètres qu’il nous reste à parcourir.

Arrivés au camp, la chaine humaine de transport des bagages se reconstitue et en moins de 10 minutes les canots sont vidés et montés sur le bord de la berge. Notre campement ambulant prend rapidement forme, ça commence à paraître sérieusement que nous sommes ensemble depuis neuf jours.

Je vous laisse ce soir la tête remplie de belles images et le cœur de grandes émotions.

À demain pour notre dernière journée complète sur la Spanish.

Louis-Étienne Prévost

Blogueur et photographe bénévole pour la fondation Sur la pointe des pieds