Journée complète sur la rivière

Une autre première : la première journée complète sur la rivière, première journée sans l’apport des facilités de la vie moderne. L’horaire sera adapté en fonction du bon vouloir de Mère Nature car, on annonce du vent et peut-être de la pluie. On s’ajustera, ce n’est pas la première fois et ce ne sera certainement pas la dernière.

Personne parmi les participants n’ont de moyens de savoir l’heure qu’il est. On vit donc un peu plus le moment présent. On se lève tôt pour certains et d’autres se font aller le « mâche patate » depuis presque le lever du soleil. Encore une fois, un excellent déjeuner préparé par l’équipe des guides.

Et c’est l’heure de remplir les barils individuels et de défaire, plier et ranger les tentes dans les mêmes barils. Ce qui deviendra un processus bien rôdé au fil des jours est encore au stade de désordre organisé. Disons qu’il règne encore un flou artistique autour de la façon de faire les choses. Mais tout cela fait partie du processus d’apprentissage.

Parlant d’apprentissage, il y en a quelques-uns qui ont négligemment monté leur tente et leur double toît hier, ce matin ils ont pu constater par eux-mêmes les raisons d’être d’un double toît, particulièrement lorsqu’on campe proche d’un plan d’eau. Comme on annonce de la pluie pour ce soir ou cette nuit, c’est certain que ce sera pris plus au sérieux.

On change les équipages : aujourd’hui je serai avec Maxime. La Mistassini est toujours aussi belle, souvent encaissée entre des murs de sable en haut desquels trônent les épinettes. Lorsqu’il n’y a pas de méandre pour couper le fetch, et comme nous nous dirigeons presque franc sud, on prend le vent direct sur le nez et avec pas mal de force à certains endroits. Il faut appuyer un peu plus sur les avirons pour passer ces zones.

Sinon la flottille fait l’accordéon, elle s’étire et se regroupe au gré des pauses régulières que l’on prend pour donner à tout le monde l’opportunité de bien s’hydrater.

Sur l’heure du dîner une petite discussion de groupe pour vérifier si on respecte bien les valeurs et limites que nous nous sommes données et ce qui pourrait être fait pour améliorer l’évolution de notre groupe.

Naïla, l’infirmière du groupe et qui travaille habituellement dans le Grand Nord, lance une question à la volée : Vous faites un souper et vous pouvez inviter qui vous voulez, une personne morte ou vivante. Qui invitez-vous?

Les réponses vont Churchill à Jean Leloup et Fred Pellerin, Monet, Stephen King, le père Noël, Michelle Obama, Martin Gray, Michael Jackson, l’auteur de la manga «Beserk » (il est mort et on voudrait bien connaître la fin). La liste est plutôt éclectique, ça tire de tous les côtés, c’est fort divertissant et ça passe le temps.

Avec Maxime on discute de cheminement scolaire, là où il se voit en termes de carrière, de voyage et de technique de pagayage.

L’arrivée au campement, une très, très grande plage de sable, se fait vers la fin de l’après-midi. Et il est évident qu’il y a eu apprentissage, les tentes se montent plus rapidement et les tâches assignées sont exécutées beaucoup plus vite.

Et comme j’écris ces derniers mots, la pluie débute. On a même droit à quelques coups de tonnerre. Tout le monde est au sec, les tâches sont faites, il ne reste qu’à attendre que ça passe avant de passer au souper.

 

-Louis-Étienne Prévost, blogueur et photographe pour la fondation Sur la pointe des pieds