« Fermez les yeux… » demande Mario C.
En ce mercredi soir, le groupe s’est regroupé autour des deux Mario dans une des tentes afin d’écouter leurs témoignages et celui de Valérie et Anik, deux jeunes adultes ayant pris part à une expédition d’aventure thérapeutique organisées par la fondation.
Elles nous racontent comment elles ont dû ramasser les éclats de leur vie en mille morceaux suite au diagnostic de cancer. Et l’impact de la fondation dans leur vie.
Les Mario poursuivent en racontant les périples de leur propre vie et ce qu’il les a mené à la création de la fondation Sur la pointe des pieds, puis la genèse même du Double Défis des deux Mario.
« N’attendez pas qu’il soit trop tard, n’attendez pas de recevoir ce fameux coup de téléphone qui vous annonce le décès de votre enfant… » raconte Mario C faisant référence à sa propre histoire.
« Sur la pointe des pieds… pour moi ça signifie de s’élever au-dessus et voir au-delà de la maladie, tout en faisant preuve de délicatesse… » explique Mario B.
« Comme sur le Lac, nous souhaitons que celui-ci laisse une trace à l’intérieur et qu’à votre tour, vous marquerez les gens autour de vous… » Le message des Mario est clair : soyons des acteurs de changement dans nos propres vies et celles des autres, ici et maintenant.
Bercés par ce partage rempli de sagesse, les participants retrouvent la chaleur de leur sac de couchage.
Avec le doux son de l’harmonica de Maxime, les participants se réveillent en douceur en ce jeudi matin. La nuit a été bonne et le visage des participants parait plus reposé que la veille. Tous se rassemblent autour des cuistots pour une dernière fois sur la banquise.
Le départ pour cette dernière progression se fait en douceur et dans la bonne humeur après avoir pris le temps d’immortaliser le moment en groupe, armée de mon Nikon.
Nous formons rapidement un groupe très proche et le groupe maintien la cadence avec force. Le temps passe si vite que rapidement, on aperçoit au loin le point d’arrivée.
À l’arrivée, c’est la fête. L’euphorie du début de la traversée est de retour. On rit, on danse, on chante, on pleure doucement.
C’est à la fois la fin et le début de quelque chose de grand.
« Dans 5 jours, je fêterai mon anniversaire de 4 ans de rémission… le Double Défi des deux Mario arrive à la croisée des chemins dans ma vie… » me raconte Valérie, les yeux remplis d’eau.
J’ai le cœur qui craque de l’intérieur.
Je sais qu’il lui reste encore un an avant de pouvoir enfin atteindre le fameux 5 ans de rémission, avant d’enfin souffler pour de bon.
Malgré que nous avons traversé le Lac et bravé le froid ensemble, je ne saurai jamais vraiment ce que c’est de traverser la tempête que le cancer a pu provoquer dans sa vie et dans son cœur. Je marche le dernier 50 mètres avec elle jusqu’à l’accueil à la Pointe Taillon. Je reste là, à côté d’elle et j’écoute notre souffle et le pas de la neige qui craque sous nos skis et raquettes.
Je regarde ses yeux qui brillent et voit la petite flamme au fond qui n’a jamais cessé de brûlé malgré la dureté de la vie.
Rendue au centre, je m’assieds sur mon traîneau, mon fidèle compagnon de mes deux dernières traversées. Je regarde le lac une dernière fois avant de rejoindre le groupe.
Un morceau de pain de pain à la main et une bonne soupe chaude dans l’autre, Anik me raconte : « Lorsque le diagnostic de cancer a tombé, au même moment je venais d’apprendre que je perdais mon emploi. J’avais débuté la chimiothérapie depuis quelques semaines et j’étais dans l’allée d’une pharmacie avec mes médicaments dans les mains… Je me rappelle m’être effondré dans l’allée en pleurant… Je revois encore les boîtes de médicament éparpillées sur le plancher… ».
J’ai l’image en tête de la douce Anik, au milieu de cette allée, essayant de garder entre ses mains tous les morceaux de sa vie brisée…
Mon cœur craque à nouveau.
Tout de même, ce jour, elle ne se doutait pas que dans la même allée, elle allait rencontrer un précieux ami avec qui elle partage aujourd’hui sa vie.
Comme quoi la vie nous réserve parfois de drôle de surprise.
Par moment, la vie peut nous sembler injuste et dure. Le cancer n’est pas un défi que l’on choisit, c’est lui qui le fait à notre place. Dans les moments les plus difficiles de notre vie, on oublie parfois que c’est dans l’adversité qu’on se forge.
Anik et Valérie en sont la preuve vivante.
Une dure impasse peut être au bout du compte le lieu des plus belles inspirations.